mercredi 9 janvier 2008

La grande guerre pour la civilisation par Robert Fisk

Dans cet ambitieux livre de quelque 900 pages, le journaliste britannique Robert Fisk, du très sérieux quotidien de centre gauche pro-européen The Independent, s’intéresse à l’histoire tumultueuse du Moyen-Orient au cours des vingt-cinq dernières années. Fort d’une réputation de journaliste à l’intégrité exceptionnelle, fort également d’une expérience extraordinaire de grand reporter au Moyen-Orient qu’il parcourt depuis trente ans, fort surtout de plusieurs rencontres personnelles avec Ben Laden avant les attentats du 11-Septembre, l’auteur signe un livre au propos vertigineux et à la documentation impeccable.

Le fil directeur du livre est le suivant : les puissances occidentales, singulièrement la France et l’Angleterre, dont la place fut prédominante au Moyen-Orient au début du XXe siècle, puis l’Amérique, ont continué à jouer un rôle trouble dans cette aire du globe qu’elles ont toujours voulu maintenir sous leur influence. Après le colonialisme actif, une période obscure de manoeuvres diplomatiques et d’alliances obscures avec les pouvoirs en place… ce bien sûr, au détriment des populations civiles et des victimes des conflits locaux. Le résultat ? Face au cynisme de l’Occident, la haine actuelle de millions de musulmans… Un livre exceptionnel mêlant enquêtes, dialogues avec les acteurs et analyses.. Robert Fisk est l’un des reporters le plus célèbres de la presse écrite britannique. Critiqué ou adulé. Depuis le début des années 1970, il s'occupe du Grand Moyen-Orient, un territoire allant de la Méditerranée à l'Afghanistan, selon la définition de l'administration Bush. Avant, il était à Belfast, en Irlande du Nord. Fisk, aujourd'hui âgé de 60 ans, a passé l'essentiel de sa vie professionnelle à « couvrir » la guerre, l'horreur, la torture, le malheur des hommes, d'abord pour le Times puis pour The Independent. Il l'a fait avec un grand courage, c'est-à-dire de près, physiquement. Il l'a fait dans une langue magnifique, toute de simplicité et de précision.

Morceaux choisis

En Afghanistan,j'ai vu les Russes combattre, au nom de leur « devoir internationaliste », le « terrorisme international » ; leurs adversaires afghans, bien entendu, se battaient de leur côté au nom d'Allah contre « l' agresseur communiste ».J'ai écrit depuis les lignes de front où les troupes israéliennes menaient ce qu'ils appelaient alors une « guerre imposée » contre Saddam Hussein (...)J'ai vu les Israéliens envahir deux fois le Liban et réoccuper la Cisjordanie palestinienne sous prétexte d'y « éliminer le terrorisme ».

(…)[J]'assistais à l'Assemblée générale des nations unies quand Georges Bush y prononça son discours sur « Dieu », le « Mal » et les armes de destruction massive, préparant ainsi l'invasion de l'Irak. Les premiers missiles annonciateurs de cette invasion ont volé au-dessus de ma tête à Bagdad. C'est ainsi que la désastreuse « guerre contre le terrorisme » du président Bush reçut par anticipation sa sanction morale.

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